Formation

La clinique juridique, un apprentissage du métier d'avocat par la pratique

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90 étudiants en Licence et Master de Droit, tous volontaires et sélectionnés, assurent le suivi, aux côtés d’avocats expérimentés, de dossiers clients bien réels : c’est la clinique juridique PSL-Dauphine. Un dispositif de formation par la pratique et un service de prestations juridiques gratuites pour des étudiants, des jeunes start-up… 

Etudiants en droits de la clinique juridique PSL-±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé Paris Dauphine

Thibaut Massart, professeur de droit privé à l, directeur de la clinique juridique et 3 collaborateurs juniors (Eva Besozzi et Maxime Billaut, étudiants en Master de Droit, et Diane Geoffroy, étudiante en 3e année de Licence de Droit au ) nous expliquent le fonctionnement de ce programme associant apprentissage théorique et pratique.

PSL : Thibaut Massart, vous êtes à l’origine du projet. On constate un développement des cliniques du droit en France. Le double objectif - pédagogique et social - est-il un principe fondateur pour toutes ? Existe-t-il un cadre, un modèle type de clinique ?

Une clinique juridique est un cabinet d’avocats au sein de l’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé, avec de vrais avocats, inscrits au Barreau, et de vrais clients, avec de réelles problématiques juridiques.

Thibaut Massart : Il y a aujourd’hui une quinzaine de cliniques juridiques en France qui reprennent le modèle anglo-saxon. Une clinique juridique est un cabinet d’avocats au sein de l’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé, avec de vrais avocats, inscrits au Barreau, et de vrais clients, avec de réelles problématiques juridiques. Il y a cependant deux particularités. D’une part, les avocats sont assistés par des étudiants en formation. C’est l’aspect pédagogique, les étudiants bénéficiant de conseils personnalisés pour améliorer leur pratique professionnelle. D’autre part, les consultations sont entièrement gratuites. C’est l’aspect social, car les cliniques juridiques ont pour finalité d’aider ceux qui n’ont pas les moyens de se payer les services d’un avocat. En France toutefois, l’aide juridictionnelle permet déjà aux justiciables sans ressources de bénéficier des services d’un avocat. Cela explique que le besoin de cliniques juridiques ait été moins impérieux que dans les pays anglo-saxons. 

PSL : Diane, Eva et Maxime, vous êtes tous les trois étudiants en droit et vous avez intégré la clinique juridique en tant que collaborateurs juniors. Quelles étaient vos motivations et quelles sont les principales compétences que vous avez développées ?

Devant un client, nous devons répondre de manière précise à ses besoins, en puisant dans nos cours sans les réciter. Cette expérience m’a appris à travailler de manière efficace, synthétique et précise, en me concentrant sur l’essentiel.

Eva Besozzi  : Intégrer la clinique était une occasion de mettre un pied dans le monde professionnel juridique et de travailler aux contacts des avocats du cabinet CMS bureau Francis Lefebvre. Leurs conseils et leurs retours d’expériences sont très bénéfiques et nous aident à développer des réflexes qui nous seront utiles pour nos carrières futures.

Maxime Billaut : La clinique m’a permis de développer des compétences techniques en droit de la consommation, tant sur le plan pratique par l’apprentissage de la rédaction de conditions générales de vente que sur le plan théorique par l’appréhension de problématiques telles que les droits du consommateur, les délais à respecter (délai de rétractation par exemple) ou la responsabilité du prestataire de services. L’organisation, l’efficacité et la rapidité sont également des compétences que j’ai appris à développer. Car il faut comprendre au mieux toutes les problématiques du client dans le délai imparti, ceci tout en menant à bien l’année universitaire et les divers autres projets. Enfin, nous avons appris à organiser un rendez-vous client et à chercher les informations permettant d’avoir une vision globale du business model de ce dernier (apprendre à cerner toutes les problématiques : droit du travail, obligations déclaratives, fiscalité…).

Diane Goeffroy : Etre confrontée à de vraies situations professionnelles est un exercice très enrichissant en tant qu’étudiante. Devant un client, nous devons répondre de manière précise à ses besoins, en puisant dans nos cours sans les réciter. Cette expérience m’a appris à travailler de manière efficace, synthétique et précise, en me concentrant sur l’essentiel.

PSL : Quelles sont les missions réalisées au sein de la Clinique ?

Thibaut Massart : Nous avons plusieurs types d’activités. Pour les consultations aux particuliers, nous traitons en moyenne 4 cas toutes les deux semaines sur toute l’année universitaire. En 2017, nous avons eu plusieurs affaires relatives à des conflits entre des locataires et leurs bailleurs. Mais les dossiers concernent tous les domaines : droit de la famille, droit des contrats, droit de la consommation, propriété intellectuelle…
En parallèle de ces consultations régulières, 90 étudiants sont en charge de l’accompagnement de 30 start-up sur l’année universitaire. Et 30 avocats du cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre encadrent les étudiants.
D’autres étudiants traitent également de dossiers substantiels confiés, cette année, par Greenpeace, la Mairie du 16è³¾±ð arrondissement ou encore par le service de la formation continue de l’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé Paris-Dauphine-PSL.

Etudiants en droits de la clinique juridique PSL-±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé Paris Dauphine

PSL : Le cabinet d’avocats CMS Bureau Francis Lefebvre est partenaire de la Clinique depuis quelques mois. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette volonté commune de mettre en place un accompagnement juridique pour les entrepreneurs ?

Thibaut Massart : C’est un partenariat unique entre une grande université (Paris Dauphine - PSL) et l’un des tout premiers cabinets d’avocats français. Il s’agit plus précisément d’un mécénat de compétences, car 30 avocats du cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre se sont engagés à consacrer au moins 3h chacun pour accompagner une équipe d’étudiants juristes qui conseillera une start-up pendant 6 mois. Une rencontre a eu lieu le 23 octobre 2017 entre toutes les parties prenantes. Les avocats étaient très engagés, les étudiants juristes très motivés et les jeunes entrepreneurs très enthousiastes. Une grande réussite ! Les 90 étudiants juristes sont des étudiants de L3, M1 ou M2 et sont répartis par groupe de 3, de niveau universitaire différent.

PSL : Comment se déroule le processus d’instruction d’un dossier au sein de la clinique ? Quelles en sont les grandes étapes ?

Pendant 6 mois nous avons appris à travailler comme une vraie équipe d’avocats tout en mettant à profit les cours proposés par la clinique juridique sur la rédaction des contrats.

Maxime Billaut : L’opération dure 6 mois et débute par une première rencontre entre l’entrepreneur et l’équipe constituée des étudiants et d’un avocat afin de répondre aux besoins généraux que l’entrepreneur a identifiés tout en cernant les problématiques juridiques connexes. L’organisation est millimétrée. Une fois ce premier rendez-vous terminé, chaque étudiant réfléchit à sa propre problématique. L’an passé, j’étais chargé de rédiger les conditions générales de vente d’une start-upF en m’appuyant sur des modèles de commercialisation, tout en les adaptant aux besoins de notre entrepreneur, et surtout à sa propre activité économique, car aucun modèle commercial n’est similaire. Selon le choix de l’entrepreneur, les modalités de remboursement peuvent être très différentes. Certains privilégieront le geste commercial et la fidélisation du client, d’autres leur trésorerie. Bien sûr, il fallait rédiger plusieurs versions, avec des clauses modulables en fonction des choix de l’entrepreneur. À mi-chemin (janvier), un rendez-vous intermédiaire est organisé entre l’avocat et l’équipe d’étudiants afin d’échanger sur nos solutions. Après celui-ci, une nouvelle navette est mise en place : chacun peut s’appuyer sur les informations et expertises des autres au sein de l’équipe, ce qui rend les discussions efficaces et utiles. Au bout des 6 mois, un rendez-vous de finalisation de l’opération est organisé entre les étudiants, l’avocat, et les entrepreneurs, au sein du cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre. Celui-ci est l’occasion pour chacun de présenter ses solutions finales et de rendre ses travaux.


Eva Besozzi  : J’ai accompagné en 2016-2017, la start-up Nap & Up (prestations de services de sieste aux entreprises) dans l’élaboration des conditions générales de vente et sur les statuts de la société. Pendant 6 mois nous avons appris à travailler comme une vraie équipe d’avocats (rendez-vous avec les clients et rendez-vous entre confrères) tout en bénéficiant et mettant à profit les cours proposés par la clinique juridique sur la rédaction des contrats.

 

PSL : Les missions de la Clinique n’ont eu de cesse de s’élargir depuis sa création, avec, en sus des missions institutionnelles, pro bono et start-up, la mise en place de consultations juridiques gratuites pour l’ensemble des étudiants et personnels de PSL. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Thibaut Massart : Contrairement à un cabinet d’avocats classique, la Clinique juridique peut aborder n’importe quelle problématique juridique et mobiliser les étudiants pour des activités diverses. Il y a quelques semaines, le Défenseur des droits Jacques Toubon nous a contactés pour une opération visant la diffusion du droit dans les collèges et les lycées. Cette initiative rejoint celle qu’avaient déjà entreprise certains étudiants membres de la Clinique l’année passée.
Dans quelques semaines, nous recevrons nos collègues de la très prestigieuse ±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé de Yale en vue d’un partenariat entre la Clinique juridique PSL-Dauphine et celle de la Law School de Yale.