« Les étudiants ont particulièrement apprécié l’interdisciplinarité et la variété des sujets traités ». Retour sur la PSL Week de novembre 2021
Parfaire sa culture, découvrir une nouvelle discipline ou rencontrer d’autres élèves… les PSL Weeks sont un temps fort de la circulation étudiante mise en place à PSL. Du 22 au 26 novembre, une trentaine de cours étaient ainsi proposés pour l’édition d’automne. Chacun rassemblait des étudiantes et étudiants aux profils et formations très différents (sciences, cursus ingénieur, arts…) et donnait autant d’occasions d’explorer un sujet en profondeur et sous un angle pluri et inter-disciplinaire. Interview croisée de trois organisatrices et organisateurs.
Interview croisée de :
- chercheur post-doctorant,, Mines Paris – PSL. Co-organisateur du cours :
- , enseignant-chercheur à l’ENS – PSL, co - organisateur du cours « »
- , doctorante à Dauphine – PSL, co-organisatrice du cours « »
PSL : Pourriez-vous présenter les PSL week en quelques mots ?
Thomas Beaussier : Cette semaine était, pour et moi-même, l’occasion d’aborder un sujet peu traité dans les cursus habituels de nos établissements (écoles d’ingénieurs) : les enjeux du vivant. Ils sont, pourtant, cruciaux au regard de l’immense défi du changement climatique et de la transition écologique.
Les écosystèmes naturels, agricoles et forestiers fournissent des produits aussi vitaux que nos denrées alimentaires, mais aussi des matières premières pour la construction, la chimie, l’énergie. Autant d’usages qui doivent prendre de l’importance compte tenu des pressions sur les ressources fossiles et minérales. Derrière, c’est toute une économie du vivant qui est appelée à se développer. Cependant, cette production doit être pensée dès maintenant dans une logique de circularité et de durabilité, afin de préserver les écosystèmes qui fournissent ces biomasses et la biodiversité qui les constituent.
Alice Schoonejans : La PSL week a également été, pour moi, l’occasion de donner vie à un projet. Juste avant la pandémie, avec ma directrice de thèse Véronique Perret, nous avions conçu à Dauphine un cours sur l’éthique et responsabilité dans les organisations des marchés, en nous appuyant sur mes travaux de recherche et un certain nombre de documents issus de mon terrain de thèse. Le format sur cinq jours proposés par la PSL Week se prêtait parfaitement à sa mise en œuvre. J’ai pu initier les étudiants aux questions éthiques relatives à la détermination des priorités globales, à la gestion des risques en lien avec les enjeux de développement durable et aux stratégies organisationnelles pour répondre à ces mêmes enjeux.
Christian Lorenzi : Daniel Pressnitzer et moi-même avons également été séduits par le concept. Nous avons saisi cette opportunité pour organiser, en partenariat avec notre collègue Brice Bathellier, chercheur au sein du tout nouvel Institut de l’audition (Institut Pasteur), une semaine de cours dédiée aux enjeux modernes en « sciences de l’audition ». Notre intention était de proposer un programme d’enseignement résolument interdisciplinaire afin de donner un aperçu des connaissances acquises et des questions actuelles en génétique et biophysique cochléaire, neurosciences de l'audition, psychologie de l'audition humaine et communication animale, audiologie expérimentale et clinique ainsi qu'en sciences de l'ingénieur. En 27h de cours, et auprès de 27 intervenants issus de PSL, mais aussi de grands centres de recherche en France et à l’étranger, les étudiants ont pu appréhender la variété des objets, des méthodes et des niveaux d’études au sein des sciences de l’audition.
Qu’est-ce que les PSL Weeks ? Coralie Chevallier, vice-présidente formation de l’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé PSL, nous explique le concept :
« La circulation étudiante entre disciplines et établissements de PSL est au cœur du projet pédagogique de PSL. Les PSL weeks permettent aux étudiantes et étudiants de L3 et de M2 de prendre des cours pour personnaliser leur cursus : développement durable, entrepreneuriat, sciences des données, les PSL Weeks offrent une diversité d’options qui représente toute la richesse des établissements de PSL. Ces semaines de cours intensifs permettent à chacun d’être acteur de sa formation et de lui donner une coloration pertinente pour un futur projet académique ou professionnel. Je me réjouis que cette initiative rencontre un succès croissant, pour nos étudiants, comme pour nos équipes pédagogiques, que je remercie pour leurs nombreuses idées et enthousiasme. Prochaine PSL Week la semaine du 7 mars 2022 ! »
PSL : Quels sont les étudiantes et étudiants qui ont participé à votre PSL Week ? Y’avait-il un niveau prérequis pour y participer ?
« Passée la timidité du premier jour, une dynamique interactive s’est installée et a tenu tout le long de la semaine. »
Christian Lorenzi : Pour suivre ce cours, il était primordial que les étudiants disposent de notions élémentaires en acoustique et traitement de signal et sachent, par exemple, caractériser un son simple ou complexe. 27 étudiants se sont inscrits. Une grande majorité d’entre eux suivent un cycle ingénieur au sein de l’ESPCI Paris – PSL, de Mines Paris – PSL ou de Chimie Paris – PSL. Mais nous avons également pu compter sur la présence d’un étudiant des Arts Décoratifs Paris (partenaire de PSL), d’une étudiante du CPES, d’un élève de l’ENS – PSL et de doctorantes et doctorants de l’école et de l’institut de l’audition. La diversité des profils était une grande richesse.
Thomas Beaussier : Pour notre part, aucun prérequis n’était nécessaire, le cours était ouvert à toutes et à tous. Nous avons accueilli les 30 étudiants de notre mastère spécialisé ±õ²Ô²µÃ©²Ô¾±±ð°ù¾±±ð et Gestion de l’Environnement, auxquels se sont joints trois étudiantes de Dauphine - PSL, trois étudiants de Mines Paris - PSL, ainsi qu’un étudiant mexicain de l’ENSCP – PSL. Toutes et tous étaient motivés par leur intérêt pour la gestion du vivant, peu abordée dans leurs établissements d’origine.
Alice Schoonejans : J’ai été agréablement surprise par la motivation et le niveau de connaissance des étudiants. Je n’avais fixé aucun prérequis et le cours a rassemblé une dizaine d’étudiants, principalement issus des cycles des écoles d’ingénieurs de PSL et des masters de Dauphine. Tous étaient bien informés et éclairés. Passée la timidité du premier jour, une dynamique interactive s’est installée et a tenu tout le long de la semaine.
PSL : Les cours s’adressent à des étudiantes et étudiants aux profils et formations très différentes. Comment cela impacte-t-il la préparation du cours ? Que retenez-vous des échanges et discussions qui s’y sont tenus ?
La diversité des étudiantes et étudiants est une richesse qui se manifeste dès les séances de cours les plus magistrales, à travers des questions et des débats
Thomas Beaussier : Je rejoins tout à fait Christian Lorenzi. La diversité des étudiantes et étudiants est une richesse qui se manifeste dès les séances de cours les plus magistrales, à travers des questions et des débats qui témoignent de leur sensibilité, tantôt pour les procédés techniques, tantôt pour les enjeux macro-économiques, pour ne citer que les exemples les plus flagrants. Ils amènent aussi leurs sensibilités personnelles sur la question vitale des pressions exercées par l’Humanité sur le Vivant. La deuxième partie de la semaine, avec des études de cas les mettant en situation, leur a permis de s’exprimer en petits groupes, où chaque étudiant interagit et apporte une contribution en fonction de sa propre expérience. J’ai été heureusement surpris de noter que les étudiants échappaient parfois au profil que suggère leur école d’origine : les étudiants du cursus Ingénieur civil des Mines n’étaient pas les derniers pour défendre la naturalité des forêts !
Alice Schoonejans : Effectivement, le format de la PSL Week favorise la réciprocité des échanges. Les enjeux liés au développement durable sont par essence interdisciplinaires et cette semaine permettait d’insister sur la culture générale nécessaire aux étudiants pour le traiter. Il était primordial, selon moi, que le cours permette aux étudiants en master de stratégie d’acquérir une meilleure compréhension des enjeux écologiques et, en retour, que les futurs ingénieurs disposent d’une connaissance plus fine des enjeux stratégiques. En m’appuyant sur ma connaissance des problématiques de la Banque Mondiale, j’ai déployé différents outils pour susciter des réactions et mettre les étudiants en position d’acteurs. En plus des cours magistraux, nous avons travaillé collectivement autour de questionnaires d’opinions, d’études de cas réelles, de mises en situation autour de problématiques et projets fictifs… Un des temps forts de la semaine a été l’organisation d’un débat autour d’une question générale articulée autour d’un camp pour ou contre. Par exemple, l’un des sujets traités était : la publicité peut-elle être tenue responsable ? Chaque étudiant devait faire une présentation argumentée autour de son sujet, indépendamment de ses convictions profondes, tout en se concentrant à la fois sur les références utilisées et les arguments de l’autre camp. Le visionnage du film Dark Waters m’a également permis de les initier aux problématiques de l’asymétrie du pouvoir entre les personnes impactées et les organisations, de mettre en évidence les dilemmes éthiques, les analyses des risques et diverses pressions organisationnelles qui structurent les décisions des acteurs sur les enjeux environnementaux et sociaux. Les échanges ont été riches !
Christian Lorenzi : Les cinq jours intenses de la PSL Week se prêtent effectivement bien à une large exploration des sujets. L’audition est un champ dynamique et porteur aussi bien du point de vue scientifique que du point de vue industriel. De la prévalence de la perte auditive dans la population en passant par la découverte des facteurs génétiques ou la reconnaissance automatique de la parole, les applications sont extrêmement variées. Il nous importait d’inclure des temps de découverte des applications métiers. Nous avons ainsi organisé une rencontre (en visio) avec deux services ORL de la clinique de la Salpêtrière et de l’hôpital Robert Debré (service pédiatrique). Les étudiants ont été immergés dans les techniques de dépistage des troubles auditifs, de poses d’implants… et ceux qui le souhaitaient ont même été formellement invités au bloc pour assister à une vraie implantation. Dans un autre registre, l’intervention d’une chercheuse de l’IRD les a initiés aux nouveaux champs de recherche sur les paysages sonores naturels. Pendant longtemps, la recherche sur l’audition a été dominée par la parole, les travaux sur les sons de l’environnement sont assez récents. Ceux cherchant à déterminer comment nous, humains, appréhendons d’un point de vue auditif ces paysages naturels, le sont encore plus. Cette semaine a permis de dresser le panorama des centres de recherche susceptibles d’accueillir de futurs chercheurs, selon les applications choisies. Lors du débriefing les étudiants nous ont fait des retours très positifs et ont particulièrement apprécié l’interdisciplinarité et la variété des sujets traités.
PSL : Pourquoi avoir décidé de participer/organiser un cours pour la PSL Week ? Envisagez-vous de renouveler l’expérience ? Comment inciteriez-vous un étudiant de votre établissement à en profiter ?
Certains des étudiants vont reprendre contact avec nous pour un stage de recherche, d’autres s’empareront certainement de l’invitation de l’hôpital Robert Debré… L’expérience a été bénéfique de part et d’autre.
Thomas Beaussier : C’est la sixième année que notre département, l’ISIGE, propose une semaine de cours dans le cadre de PSL, avec une évolution dans les thématiques proposées : 3 années sur la valeur de l’eau (gestion des ressources, valorisation et apport des outils de monétarisation), 2 années sur le soin de l’eau (enjeux autour de la ressource, variété des acteurs, des modèles et des outils de gestion de l’eau), et cette année sur la bioéconomie. En effet, les étudiants de nos mastères spécialisés nous ont témoigné depuis plusieurs années leur appétit pour les thématiques du vivant (agriculture, forêt, biodiversité…) et leur souhait de les approfondir. C’est en réponse à cet intérêt que nous avons développé ce module pour la première fois cette année et cet intérêt semble partagé par les autres étudiants de PSL.
Christian Lorenzi : L’Ecole normale supérieure - PSL participait pour la première fois cette année à la PSL Week, et le concept est très intéressant. En l’absence de semaine banalisée à l’école, il est vrai que cela reste difficile, pour les étudiants comme pour les enseignants, de dégager du temps et d’interrompre les activités de recherche toute une semaine. Cependant, c’est une ouverture et une opportunité. Certains des étudiants vont reprendre contact avec nous pour un stage de recherche, d’autres s’empareront certainement de l’invitation de l’hôpital Robert Debré… L’expérience a été bénéfique de part et d’autre et nous envisageons sérieusement de la renouveler. Nous en profiterons pour apporter quelques améliorations au programme, inclure des visites de laboratoires, des temps de travaux partagés sur la pause méridienne… Nous espérons surtout attirer davantage d’étudiants du CPES, de l’ENS - PSL ou de l’EPHE- PSL pour les prochaines éditions.
Alice Schoonejans : C’était une très belle expérience d’enseignement et je recommencerai sans hésitation. Du point de vue des étudiants, j’ai été frappée par la richesse de l’offre. C’est un « buffet pédagogique » et une opportunité assez rare, il me semble. C’est aussi un moment de grande liberté et d’échanges. En tant qu’enseignant, le format nous permet de concevoir ce cours de A à Z, et ainsi de le structurer autour d’un questionnement qui nous est propre. Échanger avec les étudiants pendant cette semaine sur des documents propres à mes recherches a été une source d’inspiration et je compte bien m’appuyer sur cette expérience dans les mois à venir.
Une semaine de cours en biogeochimie encadrée par pour une vingtaine d'étudiants . Des manipulations effectuées sur place et des TPs utilisant nos laboratoires et instruments pour former la nouvelle génération d'écologues
— CEREEP-Ecotron IleDeFrance (@CEREEP_Ecotron)
Interview croisée de :
- Thomas Beaussier, chercheur post-doctorant, Institut Supérieur d’±õ²Ô²µÃ©²Ô¾±±ð°ù¾±±ð et de Gestion de l’Environnement (ISIGE), Mines Paris – PSL.
- Christian Lorenzi, enseignant-chercheur à l’ENS – PSL,
- Alice Schoonejans, doctorante à Dauphine – PSL