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Une passion pour la modélisation et la précision  

Dans son bureau lumineux à l’ENS - PSL, les murs sont couverts de cartes topographiques, de circuits de randonnée et de plans de villes. « Les cartes, c’est un peu mon obsession. J’aime cette représentation de la réalité, un modèle qui nous donne l’illusion de comprendre, alors qu’en réalité, tout est bien plus complexe », confie Timothy Bourke.
Chercheur chez Inria, il fait partie de l’équipe-projet commune PARKAS (Parallèle Kahn Synchrone // ENS-PSL, Inria, CNRS) localisée au Département d'Informatique de l’ENS – PSL, où il repousse constamment les frontières de la recherche en systèmes embarqués et langages synchrones.
 

Du bout du monde aux langages synchrones

« Faire une thèse m'a permis de combiner mon besoin de comprendre les sujets complexes et la possibilité de voyager. » Son père, toxicologue, vétérinaire lui a transmis le goût de la recherche, mais ce sont les systèmes informatiques qui l’ont fasciné. Après une première carrière dans l’industrie, il entame une thèse à Sydney, puis un postdoctorat en France, attiré par l’excellence française en langages de programmation et en modélisation. En 2011, il rejoint l’équipe PARKAS. Depuis, il allie modélisation formelle, compilation et vérification pour concevoir des logiciels embarqués capables de répondre à des contraintes en temps réel de plus en plus exigeantes.
 

Les systèmes embarqués sont omniprésents : dans les avions, les voitures autonomes, les centrales nucléaires... Ce sont eux qui assurent que chaque action se réalise au moment précis, avec une fiabilité absolue. Son domaine d'expertise : les langages synchrones, qui permettent de concevoir des programmes garantissant ponctualité et fiabilité maximales. Avec son équipe, il développe des outils utilisés par des industriels tels qu’Airbus.

Ces dernières années, il a consacré une part importante de ses travaux, aux côtés de ses doctorants, au développement de Vélus, un compilateur pour les systèmes embarqués dont la correction a été rigoureusement démontrée par une preuve mathématique assistée par ordinateur.

Science et industrie : un mariage complexe mais fertile

Collaborer avec l’industrie est un exercice d’équilibriste. « On doit comprendre leurs besoins, mais aussi garder notre liberté d’exploration. L’industrie cherche des solutions immédiates, tandis que nous avons parfois besoin de prendre du recul », explique-t-il. Pourtant, il insiste sur la richesse de ces échanges : « Ces collaborations nous permettent d’accéder à des problématiques concrètes issues du terrain, qui orientent notre recherche et nous poussent à innover. »
Il reconnaît cependant les défis liés à ces partenariats : « Le temps de l’industrie n’est évidemment pas le même que celui de la recherche. On ne peut pas toujours prédire si une solution va fonctionner ni combien de temps cela prendra. » Mais pour lui, ces contraintes sont un levier d’avancement : « C’est en cherchant à répondre à ces exigences que l’on fait émerger de nouvelles avancées scientifiques. »

Transmettre et innover

Dans son bureau, au milieu des cartes, trônent des trombinoscopes et des photos d'étudiants, certains diplômés depuis des années. Cette tradition instaurée par un ancien collègue lui rappelle l’une des facettes essentielles de son métier : l’enseignement. « Comme disait Jean Vuillemin (professeur à l'ENS - PSL), c’est aux élèves de bosser. Nous, on est là pour les accompagner », déclare-t-il en riant. À l’ENS – PSL, il encadre des doctorants, copréside des conférences telles qu'EMSOFT, qui cherchent à faciliter les ponts entre science et industrie.
Son ambition pour les années à venir : réduire l’écart entre la théorie et la pratique en trouvant des modèles facilitant l’implémentation des systèmes embarqués dans des environnements réels.
L’entretien touche à sa fin. Ses yeux s’attardent sur les cartes accrochées au mur. Entre les reliefs montagneux et les systèmes intégrés, un fil rouge : l’exploration. « J’aimerais juste continuer comme ça. Faire de la recherche qui a du sens et transmettre ce que je sais. »