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Un an après, quel regard sur la jeunesse en temps de pandémie ? Collaboration entre des étudiants de l’ENS – PSL et le journal Le 1

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En mars 2020, suite au contexte sanitaire et sur décision du Président de la République, les campus universitaires français fermaient provisoirement leurs portes et les enseignements basculaient en présentiel ouvrant ainsi une période inédite dans l’histoire de l’université. Un an après, neuf étudiantes et étudiants du programme Médecine-Humanités ENS – PSL ont travaillé avec la rédaction du journal Le 1 pour l’édition d’un numéro dédié « Jeunesse, à quand les jours heureux ? ». Elsa, Claire et Bastien reviennent sur cette expérience.

cc_Fréderic Albert pour l'ENS - PSL

PSL : Depuis plus d’un an, la pandémie occupe largement les colonnes des journaux. Comment est venue l’idée d’un numéro sur le thème jeunesse et pandémie ?

C’était l’occasion pour que les jeunes ne soient pas seulement des « objets » de réflexion, mais agissent aussi comme « sujets » dans ces débats.

Bastien Saïsse :  Cette collaboration est née de l’idée de marquer l’anniversaire du basculement de la France dans le confinement. Nous souhaitions interroger les conséquences de moyen et de long terme de ces mesures pour notre société, ainsi que les dimensions plus durables de la crise sanitaire : économique, sociale et politique. Or, après réflexion collégiale, il nous a semblé que les jeunes, c’est-à-dire les membres de notre société qui se trouvent dans une période charnière de leur vie, déterminante sur les plans relationnel, éducatif, culturel, professionnel, politique, économique etc., étaient une partie de la population très impactée par la crise au présent et au futur. Cet « objet » de la jeunesse nous apparaissait donc très pertinent pour réfléchir sur les traces laissées par la pandémie dans notre société. En tant qu’étudiants, nous sentions que notre parole aurait plus de valeur en portant sur la jeunesse que sur un autre sujet. Nous sentions aussi que c’était l’occasion à saisir pour que les jeunes ne soient pas seulement des « objets » de réflexion mais agissent aussi comme « sujets » dans ces débats.

Claire Vauxion : En effet, si on constate moins d’hospitalisations et de décès suite au Covid-19 pour les jeunes, ceux-ci ont cependant été très largement touchés par la pandémie : tout un mode de vie a été remis en question. Le séminaire « Pandémie : faits et politiques » que nous suivons dans le cadre du programme Médecine - Humanités de l’ENS - PSL, nous a permis, par la richesse des interventions et des échanges avec les chercheuses et chercheurs invités, d’envisager sous différents angles disciplinaires les enjeux de la pandémie. Pour ne citer qu’un exemple, lors de l’intervention de Marie Gaille, philosophe et directrice de recherche au CNRS, nous avons particulièrement discuté des thèmes de l’isolement et de la rencontre, mais aussi du rapport à l’avenir des jeunes.

Elsa Touretz : En effet, après cette année émotionnellement forte nous voulions faire le point sur une dimension précise de la pandémie. Le thème de la jeunesse n’avait pas été grandement traité (des études sur la santé mentale des jeunes venaient quand même de paraître) ou il l’avait été d’une manière peu délicate (on pensera notamment à la médiatisation à outrance de la rave party du Nouvel an). Ainsi, l’idée a émergé : nous - les étudiants - étions vivement intéressés et nous nous sentions également plus légitimes à participer au numéro en choisissant les intervenants mais aussi à y produire nous-même, par ailleurs la rédaction du journal était enthousiaste car aucun numéro ne s’y était attardé jusqu’à présent.


PSL : Pour la réalisation de cette édition du journal Le1, la conférence de rédaction a été étendue. Comment s’est fait le choix des articles et des scientifiques interviewés ?  

Claire Vauxion : Nous voulions explorer les effets de la pandémie sur la jeune génération en croisant les regards et en nous appuyant sur des échanges. Ceux-ci ont eu lieu entre nous, étudiantes et étudiants, mais aussi avec les équipes du journal Le 1 et celles de l’ENS – PSL associées au projet. Cette idée du dialogue a été prolongée dans le contenu du numéro puisqu’il comprend des articles à plusieurs voix : des entretiens (avec un médecin et une sociologue) et des articles écrits collectivement (avec une doctorante en philosophie et entre étudiant-e-s du programme Médecine-Humanités).

N°337 du journal Le Un

PSL : Vous avez co-écrit pour ce numéro un article en accès libre intitulé « Les jeunes au rendez-vous du Covid ». Si vous ne deviez retenir qu’un seul rendez-vous pour la jeunesse d’après pandémie, quel serait-il ? Et pourquoi ?

Bastien Saïsse : Selon moi, le rendez-vous des jeunes après la pandémie est celui du débat social et politique. Nous, les jeunes, désignés par ce « mot-valise » qui nous sépare de l’enfance, mais nous distingue de l’âge adulte, ne sommes pas assez considérés comme des citoyens, et, paradoxalement il s’agit d’un rôle que nous avons parfois du mal à investir. Or, l’évolution de notre société doit se faire en regardant l’avenir et nous sommes toutes et tous totalement légitimes à contribuer, de toutes les façons qui nous semblent utiles. Nous devons participer et la discussion doit nous inclure, pour faire avancer les choses sur les sujets cruciaux pour le présent et le futur de notre société. Cela passe par le partage de la parole, mais aussi par une représentation correspondant à la diversité des existences.

Elsa Touretz : Pour moi, ce serait sans aucun doute celui de l’écologie. Si les problématiques sociales sont évidemment pressantes et d’une importance capitale, l’urgence écologique doit d’autant plus être mise en lumière à mon sens, qu’elle passe justement souvent au second plan d’un point de vue politique. Lors des dernières élections européennes, les jeunes ont su montrer que cette thématique leur tenait à cœur. Cela tient en partie au fait que les conséquences du réchauffement climatique s’accélèrent et qu’il devient pour nous, la jeunesse, impossible de fermer les yeux sur la planète que nous laisserons aux prochaines générations. Enfin, je pense que cette crise sanitaire nous a justement offert la chance de pouvoir réfléchir et surtout infléchir notre mode de vie avec notamment une limitation de nos déplacements aériens ou la valorisation de la consommation locale pour aider les petits commerçants dans cette pandémie. Cet élan qu’a pris l’engagement écologique avant la crise, mais surtout pendant, offre des horizons prometteurs que nous nous devons d’honorer.

Le programme Médecine - Humanités de l’ENS – PSL

Formation innovante et unique en France, le programme Médecine Humanité de l’ENS – PSL s’adresse aux étudiantes et étudiants en médecine qui souhaitent compléter leur formation professionnelle par un cursus adapté et au plus haut niveau en Humanités à l’ENS – PSL. Les trois années du programme permettent d’obtenir, en parallèle avec les études médicales, un Master en humanités et le Diplôme de l’École normale supérieure - PSL. Ce programme bénéficie du soutien de deux mécènes : la Fondation Bettencourt Schueller et la MGEN.